Ce jour là, Frankkyy s’en rappellerait toute sa vie. C’était une douce journée d’automne, il pouvait sentir la douce caresse du vent sur sa nuque découverte, et entendre le léger bruissement des feuilles mortes qui se brisaient contre le marbre.
Après un repas festif, en l’honneur des 8ans du jeune vagabond, ses parents se mirent tôt au travail. Le père était forgeron, et la mère nettoyait les armes et faisait l’inventaire. Le père de Frankkyy lui avait offert une magnifique épée argentée, a la lame fine, qu’il ne pourrait utiliser que pour ses 15ans, comme il était coutume dans la famille. C’était le seul souvenir qu’il lui restait.
Il jouait avec son épée en bois, lorsqu’un homme se présenta au comptoir :
« -Que puis-je pour vous ? demanda d’une voix douce la mère du vagabond.
- La caisse, et vite ! à ce moment la arriva un autre homme apparemment ranger, armé d’un arc doré, et amoché d’une cicatrice sur la joue.
-Tu ne comprends pas, puta ! s’exclama t’il avec un fort accent espagnol, et en menaçant la pauvre femme d’un poignard aiguisé. Puis il s’avancèrent tous deux, la femme du forgeron essaya de s’interposer, et reçu une gifle.
Son cri alerta son mari, qui sauta sur le ranger. L’autre homme sortit une lourde épée, et trancha d’un coup la tête du forgeron. La femme hurla, puis d’un geste menaçant, le ranger montra la caisse. Elle obéit, et la lui tendit, tremblotante.
« - Il faut mieux ne pas laisser de témoins, s’exclama le ranger.
- C’est comme si c’était fait, chef ! » répondit le deuxième brigand. Et il planta aussitôt son poignard dans le ventre de la femme.
Par chance, Frankkyy était caché derrière la forge, mais il avait tout vu.
Depuis, il n’avait vécu que pour ça.
Ayant atteint ses 15ans, il équipa enfin l’épée offerte par son père, et alla voir le responsable de l’éducation des aspirants mercenaires, qui était depuis toujours un ami de la famille.
Son instruction se passa bien, et il fut promu mercenaire après quelques mois d’études.
Il était fier de lui, et s’orientait déjà vers la carrière d’assassin qu’il avait décidé de faire dès sa soixantième année. Il pourrait alors venger sa famille.
Il se dirigeait vers la mine de mas, pour y découper en rondelles quelques feferns mutants.
En arrivant, il vit quelques une de ces créatures plutôt occupées. Il se rapprocha, et aperçut une jeune acolyte inexpérimentée vêtue d’une magnifique robe rouge, et équipée d’un sceptre de débutante. Inexpérimentée, certes, mais d’une beauté ! Il saisit son courage à deux mains, puis sauta sur les créatures entourant la magnifique jeune femme, et leur trancha les racines aussitôt.
Encore apeurée, elle lui adressa un sublime sourire de remerciement.
Il avait à présent deux raisons de vivre.
Il était encore en train de rêver d’un avenir commun, lorsque qu’il se rendit comte qu’elle s’enfuyait.
« -Attends ! s’exclama t’il, tu ne m’as même pas dit comment tu t’appelles !
- Healise ! » hurla t’elle, mais déjà elle était partie.
Il ne la revit plus.
Quarante-cinq ans après.
Une goutte d’eau provenant de la fuite dans un coin de la tente de Frankkyy, non réparée faute de moyens,provoqua son réveil. Malgré cela, il commença sa journée de bonne humeur, car c’était sa première en tant qu’assassin. Il se leva tant bien que mal en s’accrochant aux parois de sa tente, provoquant l’écroulement de celle-ci, et par conséquent un grognement de l’assassin. Un marchand passa :
« -Oh, une tente qui grogne !
-Très drôle, répliqua Frankkyy »
Cependant, il pensait a sa journée à venir, le directeur de l’agence de voyage lui avait promis 15 jours dans un atmosphère pacifique, à la montagne, ou il pourrait gagner facilement l’expérience qui ferait sa réputation à venir.
Frankkyy montra donc son ticket au capitaine du navire puis embarqua aussi tôt.
Le voyage fut paisible et de courte durée.
Le directeur de l’agence n’avait pas menti, aucun des yetis habitant l’île d’Azria n’était agressif, et le paysage magnifique. Se sentant tout d’un coup invincible, Frankkyy fut un peu trop gourmand et attaqua une dizaine de yetis. Il se rendit vite comte de son erreur, il n’étaient certes pas agressifs, mais puissants et agiles.
C’était la fin, le sang ruisselait déjà sur sa cuisse gauche. Tous ces rêves sur son avenir d’aventurier s’écroulaient d’un coup. Adieu Madrigal,il allait mourir.
Puis d’un coup, il se sentit plus fort, et dans un élan de puissance et d’allégresse, il terrassa les monstres. D’où lui venait cette force soudaine ?
«- Alors l’ami, on a quelques soucis ?
La voix provenait d’une magnifique prêtresse vêtue de rouge, agitant de ses mains un sceptre doré.
-Qui…Qui êtes vous ? répondit en tremblotant l’aventurier.
-Je suis Healise, prêtresse de mon état. Je propose mon aide aux aventuriers qui en ont besoin, et j’acquis ainsi de l’expérience. »
-C’est vous ? nous sommes donc quittes, alors. »
Elle mit quelques temps à s’en rappeler, puis s’exclama :
« -Oh !
-vous paraissez bouleversée, répondit l’assassin.
-Mon frère est décédé hier. Nous étions inséparables. »
Visiblement troublée, elle s’approcha de l’assassin, et déposa sur ses lèvres, un baiser chaud, humide de larmes.
Et c’est ainsi, qu’au fil du temps, Healise et Frankkyy devinrent inséparables.
Un jour, elle décida de le présenter à sa famille.
Frankkyy s’habilla donc d’un smoking blanc, et attendit qu’elle vint le chercher, ce qu’elle fit, ponctuelle comme d’habitude.
Ils arrivèrent devant la modeste maison de la prêtresse, et elle lui dit :
« - attends moi la, je vais prévenir mon père ! » et elle fila par la porte de l’habitation.
Par curiosité, Frankkyy se pencha par la fenêtre.
Et la… Horreur ! Healise alla embrasser sur les deux joues, un ranger possédant une cicatrice sur la joue, et qui s’exclama , avec un fort accent espagnol :
« - Ah ! te voila donc, ma fille ! qui est donc l’heureux élu que tu voulais me présenter ! et bien fais le donc entrer ! »
L’arc doré était accroché contre le mur.
Healise se rapprocha de la porte l’ouvrit, et Frankkyy, tremblotant, ne put s’empêcher de commettre le meurtre pour lequel il avait vécu. Il sauta sur le ranger, et lui trancha la gorge.
Healise criait, Frankkyy versa une larme, puis partit en courant.
C’était fini, il avait perdu l’amour d’Healise et avait tué le malfaiteur qui avait ruiné son enfance.
C’était fini, alors pourquoi continuer, il avait perdu les deux raisons qui le poussait à vivre.
Les agents de l’office public retrouvèrent son corps poignardé, apparemment par lui-même, le lendemain, et l’enterrement du ranger se fit le même jour.
Healise était horrifiée, elle avait perdu l’amour de sa vie ainsi que son père, elle ne voulait, elle ne pouvait plus vivre. Ils étaient son oxygène. Après son frère , son père et maintenant Frankkyy. Elle s’approcha de la fiole de poison qu’elle gardait depuis la mort de son frère, et l’avala d’un trait.